Présentant mardi les grands axes du projet loi de finances 2008, devant la Chambre des Conseillers, le ministre de l’Economie et des Finances, Salaheddine Mézouar, a rappelé que ce projet - premier act législatif du gouvernement Abbas El Fassi - s’inspire des orientations royales, surtout celles contenues dans le dernier discours du Trône et du discours d’ouverture de l’actuelle législature, le 11 octobre dernier.
L’exposé du ministre, qui a été fait en prélude à la séance hebdomadaire des questions orales, s’est articulé autour de cinq thèmes, à savoir l’économie générale du projet de budget, les conditions du développement durable et d’une croissance soutenue, la dimension sociale du projet, la promotion du monde rural et la lutte contre les effets de la sécheresse et, enfin, sa dimension régionale.
On y relève que grâce aux réformes et aménagements entrepris ces dernières années, l’économie nationale a globalement fait preuve de rigueur et de bonne tenue face aux aléas climatiques et à une conjoncture internationale plutôt difficile puisque le taux de croissance pour l’année qui s’achève est estimé à 5,6%, hors agriculture, alors que le taux d’inflation, mieux maîtrisé, a été ramené à 2,2% durant les neuf premiers mois de l’exercice contre 3,2% durant la même période de 2006 et que le déficit de la balance commerciale est limité à 1,5% du PIB, malgré le renchérissement de produits que le Maroc importe massivement (hydrocarbures, biens d’équipement, céréales en cas de mauvaise récolte, comme ce fut le cas cette année...)
Quant aux objectifs que ce projet s’est fixés, S. Mezouar a précisé qu’ils concernent essentiellement la consolidation du tissu économique en général, la promotion des secteurs sociaux et du monde rural, le développement des pôles régionaux et de la PME, la modernisation de l’entreprise marocaine en vue de la rendre plus performante et compétitive, l’amorce d’une réforme fiscale globale, le relèvement du niveau de l’investissement public qui sera porté, pour la première fois, à plus de 100 milliards dhs en 2008, soit environ 31% du PIB contre 5% entre 2000 et 2002, et quelque 30% du PIB durant la dernière législature, ainsi que la modernisation du cadre législatif de l’économie et la mise en œuvre d’un régime fiscal et douanier plus souple et incitatif.
Aussi, le projet de budget propose-t-il de ramener l’impôt sur les sociétés (IS) à 30% au lieu de 35% actuellement et à 37% au lieu de 39,6% pour le secteur financier ainsi qu’une baisse du taux maximum des droits de douane sur les produits et équipements industriels de 45% à 40%. Le tout dans la perspective de la modernisation du système et de la diminution de la pression fiscale qui concernera également l’IGR (Impôt général sur le revenu) lequel devrait être ramené, à partir de 2009, de 42% à 38% en 2012 et dont le seuil imposable devrait passer de 240.000 dh/an à 300.000 dhs (soit un salaire mensuel moyen de 2000 dh à 2500 dh). Idem pour la TVA dont le taux sera ramené progressivement de 20% actuellement à 18%, a précisé le ministre qui a indiqué que le gouvernement est déterminé à relever le rythme de la croissance économique à travers une stratégie à moyen et long termes et une approche sectorielle et spatiale novatrice visant, en particulier, à transcender le déficit et les faiblesses structurels de notre agriculture, à promouvoir le secteur de la pêche et les autres activités à forte valeur ajoutée (tourisme, nouvelles technologies, services, etc.), et à réduire la facture énergétique du Maroc et sa dépendance en ce domaine. Aussi, a-t-il été décidé de renforcer les capacités d’intervention du Fonds Hassan II pour le développement économique et social en y injectant 800 millions dh pour le tourisme, 250 pour le secteur des services, 500 pour celui de l’automobile, 100 au profit d’une caisse spéciale destinée à encourager la recherche et l’innovation en matière de nouvelles technologies de l’information et 50 millions de dh pour donner le coup d’envoi effectif au programme « Rawaj » (promotion du commerce intérieur), attendu que cette enveloppe sera portée à 200 millions à partir de 2009. L’artisanat n’est pas en reste puisqu’il lui sera alloué quelque 880 millions dh (+85%) dans le cadre du programme « défi du millénaire ».
Globalement donc, le projet de budget vise, selon S. Mézouar, à poursuivre et conforter la politique d’ouverture de l’économie marocaine sur son environnement régional et international, améliorer le cadre de travail de l’entreprise et la qualité de nos produits, réduire le déficit de la balance commerciale, promouvoir nos exportations, encourager les investissements... à travers diverses mesures dont la modernisation du cadre institutionnel et juridique, la création de zones franches, la poursuite de la libéralisation du commerce extérieur, l’adéquation des systèmes des changes et financier et la réforme de l’administration, de la justice, des caisses de retraite.
Le gouvernement est d’autre part déterminé à promouvoir les secteurs sociaux (enseignement, santé, habitat, lutte contre la pauvreté, la marginalisation et l’analphabétisme...) auxquels d’ailleurs seront alloués plus de 50% du budget de l’Etat. Le ministre a donné une multitude de chiffres pour étayer son propos et dont nous retiendrons, à titre indicatif seulement, que la couverture médicale de base concernera 80% de la population (y compris, désormais, les étudiants) avec une enveloppe de 8,2 milliards dhs (+10,4%), que la résorption du déficit de certaines caisses de retraite a mobilisé plus de 11 milliards dhs au titre du règlement des arriérés de l’Etat vis-à-vis de ces organismes auxquels il sera encore versé encore 10,9 milliards en 2008. Que la pauvreté est en constante régression (de 19% en 1999, les personnes ou ménages les plus démunis sont passés à 11% en 2007) grâce notamment aux milliers de projets initiés dans le cadre de l’INDH pour environ 6,7 milliards dh et dont l’enveloppe, en 2008, est estimée à 3,8 milliards dont 1,2 milliard prélevé sur le budget général. Que le chômage a été ramené en dessous de 10% en 2007 et que, comme indiqué dans la déclaration gouvernementale, il est possible de le réduire à 7% à l’horizon 2012. D’ici là, le gouvernement s’engage également à former chaque année 15.000 ingénieurs, 10.000 assistants (tes) sociaux et de lutte contre l’habitat insalubre jusqu’en 2010 pour un montant global d’environ 21 milliards dhs dont une contribution de l’Etat à hauteur de 8 milliards dhs. Quelque 83 agglomérations et 200.000 familles sont concernées par ce programme. 2008 verra, en outre, le lancement d’un nouveau produit d’habitat au profit des ménages dont le revenu mensuel n’excède pas les 2800 dh/mois qui sera complètement exonéré d’impôt et de taxes et dont le prix de revient ne devrait pas dépasser les 140.000 dhs (soit 14 millions de cts).
D’autre part, et afin de préserver le pouvoir d’achat, particulièrement des couches démunies, toutes les mesures ont été prises pour maintenir le taux d’inflation dans les limites de 2% et de porter les ressources de la Caisse de Compensation en 2008 à près de 20 milliards dh en veillant, cependant, à ce que les interventions de celle-ci profitent davantage aux couches nécessiteuses et les plus démunies.
Le développement du monde rural et la lutte contre les effets de la sécheresse, constituent, a rappelé M. Mézouar, l’un des axes prioritaires de l’action du gouvernement qui y consacrera 9,4 milliards dh (contre 8,3 milliards dans l’exercice écoulé) - soit +13,2 %) en plus de 3 autres milliards qui seront mobilisés par les établissements publics et de 200 millions dh destinés au Fonds de développement rural. Un total donc de 12,4 milliards dh qui serviront à l’approvisionnement en eau et en électricité, au désenclavement de nos campagnes, à l’installation de lignes téléphoniques et autres équipements de base tels qu’écoles, dispensaires... auxquels il sera alloué 4,6 milliards dh au titre du prochain exercice fiscal. 2008 verra aussi l’aurore d’une nouvelle stratégie visant une réforme globale et en profondeur du secteur agricole.
Concernant, enfin, la dimension régionale du projet de budget, S. Mézouar a indiqué que le but escompté est un développement harmonieux et équilibré de toutes les régions du Royaume à travers, principalement, la promotion de pôles de développement et de nouveaux centres urbains, la consolidation du rôle des agences de développement du Nord, de l’Est et du Sud par l’allocation d’une enveloppe supplémentaire de 600 millions dh, la protection de l’environnement et la préservation des équilibres écologiques, la rationalisation de la gestion de l’eau et la lutte contre la désertification (pour 400 millions dh en 2008), le renforcement du rôle des collectivités territoriales et leur équipement en infrastructures de base... 77 milliards dh seront ainsi consacrés à l’investissement public au niveau régional sachant toutefois que certains secteurs (défense, sécurité, construction de ports et d’aéroports, etc.) ne font pas partie de ce chapitre, a précisé le ministre tout en affirmant, en guise de conclusion, que le taux annuel moyen de croissance de 6 % durant les cinq prochaines années est parfaitement à la portée de l’économie marocaine et qu’il est tout aussi réaliste d’envisager de porter le revenu annuel moyen des ménages de 19.500 à 27.000 dh en 2012, soit +40 %. Une performance que le Maroc a du reste réalisée tout au long des dernières années et qu’il est tout à fait en mesure de rééditer lors du prochain quinquennat.
Source: lopinion,maroc